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Halte au trafic des fossiles



«After Merzouga Village you'll be taken to the desert tracks, to Hmar Lakhdad, where you'll be able to visit real fossil beds with millions of years old»: «Après Merzouga, nous allons vous emmener à Hmar Lkhdad, le site des célèbres fossiles qui datent de la préhistoire» L'accroche est attrayante.


Elle est annoncée en gros caractères sur un dépliant destiné aux touristes. Un dépliant qui offre un alléchant programme nommé «The Morrocan Desert Pack». Ce dernier prévoit des expéditions en 4x4 et Hammer au sud Marocain, des nuits sous la «pleine lune» et des visites des sites préhistoriques où la collecte des fossiles est permise. Et oui, il s'agit bien d'une collecte permise! Pourtant, la loi marocaine est claire : Selon le Dahir du 13 février 1914 relatif à la conservation des monuments historiques, et qui instaure les modalités de conservation et d'inscriptions des objets d'arts et d'antiquités du Royaume chérifien : «Tous ceux, des immeubles classés appartenant au maghzen telles que les ruines de villes anciennes, les forteresses et remparts, les palais de nos prédécesseurs et leurs dépendances etc. Ainsi que toutes les mosquées, koubba, médersa etc…, ayant un caractère habous public, seront inaliénables et imprescriptibles tant qu'ils n'auront pas fait l'objet d'un décret de classement». En principe, ces décrets de loi régissent tout ce qui a relation avec la protection des biens culturels et patrimoniaux.

Néanmoins des petites failles ont permis à des marchands d'en abuser et d'enfreindre la loi en creusant des sites destinés juste au ramassage externe (c'est-à-dire à la collecte des objets archéologiques qui apparaissent au ras du sol) et d'adhérer à un réel trafic de fossiles, trilobites et autres antiquités. Notre équipe est partie sur place afin de comprendre les méandres de ce commerce qui menace une partie de notre héritage archéologique témoignant des créations de nos ancêtres à travers les âges. Un héritage qui constitue nos racines culturelles et philosophiques.

Au cœur du désert marocain
«Hmar LaKhdad», 25 kilomètres d'Erfoud et 40 degrés à l'ombre. Il était 10h30 lorsque notre guide nous rejoint. Il s'appelle Mhamed Tahiri. Il est également propriétaire d'une boutique de vente de fossiles et de trilobites sur la route de Rissani. Mhamed devait nous emmener à «Lcariane». C'est un site où plusieurs fossiles sont remontés en surface à cause de l'érosion éolienne qui balaye les sols, et qui laisse apparaître des «trésors» en l'absence de couvert végétal protecteur. «Ces deux conditions facilitent davantage le repérage des artefacts d'avantage, et c'est ce qui détruit progressivement ce site immense.
C'est dû principalement au méfaits du tourisme de masse non contrôlé» annonce notre guide, Et oui, aveuglé par la détérioration des sites sahariens, Mhamed ne tarde pas à cracher le morceau : «Nous en avons assez de ces pratiques diaboliques».

Tout au long du chemin, il nous explique que le phénomène de fouilles des sites pittoresques a débuté timidement dans les années 70, sous forme de ramassages isolés par ci par là, effectués par des touristes avertis. Mais peu à peu, et vu l'intérêt manifesté par les visiteurs pour les objets patrimoniaux, les «bazaristes» et marchands de fossiles ont commencé à inciter les nomades à ramasser tout ce qui est à portée de main. Et c'est ainsi que ce trafic s'est donc organisé. De nos jours, tout au long des circuits touristiques, des vendeurs d'objets archéologiques ou d'intérêt ethnographique exposent leurs «marchandises» à côté des produits d'artisanat, de fossiles et de minéraux.

«Ce commerce «illicite» était à l'origine destiné aux touristes de passage en quête d'un souvenir original, mais vu la quantité des gains recueillis, certains réseaux nationaux et internationaux se sont constitués. Ce qui est plus aberrant c'est que pendant cette dernière décennie, les trafiquants des objets de patrimoine ne se contentent plus du ramassage des objets apparents à la surface du sol, ils pratiquent aussi des fouilles clandestines dans les sites néolithiques et saccagent les monuments funéraires protohistoriques», rappelle Mhamed Tahiri.
Concernant la clientèle de ces commerçants ambulants, elle est principalement constituée d'acheteurs de nationalités étrangères. Il s'agit non seulement des touristes cherchant un souvenir de leur voyage. Mais aussi des acheteurs spécialisés.

«C'est cette dernière catégorie qui est responsable de l'anéantissement des sites préhistoriques et protohistoriques du Sud marocain. Elle achète en très grande quantité, des emballages sélectionnés d'artefacts rares afin de satisfaire la demande de leur clientèle» se désole notre guide. Il poursuit : «Il nous est même parvenu que ces trafiquants, associent des bédouins nomades à des exploitations en gros des sites qu'ils découvrent eux-mêmes. Ils se lancent dans l'extraction de dalles portant les gravures rupestres et s'approprient des objets patrimoniaux».

Une problématique mondiale
11h30 : Arrivée à «Lcariane». Un groupe de touristes nous paraît à l'horizon. Accroupis, ils étaient tous en train de ramasser des fossiles et de prendre des photos. En aucun moment, nous n'avons vu des «engagés» en train de noter les détails d'extraction.
Pourtant c'est là où réside toute la problématique dite de «repérage». Car si la communauté scientifique internationale commence à s'inquiéter de ce phénomène de ramassage des fossiles dans les divers sites archéologiques du monde, c'est que les ossements ou les fossiles trouvés en privé sont dépourvus du contexte dans lequel ils ont été découverts. A titre d'exemple, le type de sol, l'endroit exact, etc. De ce fait, le matériel préhistorique découvert devient pratiquement isolé de toute observation.

«A vrai dire c'est une réelle problématique, mais au Maroc, nous luttons à peine contre ces fouilles illicites et ces ventes insensées», précise notre guide.
12h00 : A quelques mètres des touristes, des vendeurs d'objets antiques ambulants commencent à s'incruster. Et au moment où une première partie d'entre eux étale ses biens, une autre s'approche timidement de la foule étrangère. «Souvenirs …souvenirs», s'écrient t ils.
Des souvenirs qui rassemblent, outre les petits fossiles, des morceaux de mâchoires d'animaux, des trilobites, des pendentifs taillés. Tous, appartenant au patrimoine national. En tout cas, ce qui est intrigant, c'est que les marchands ne les cachent pas. Ils les exhibent fièrement et avouent même les avoir arrachés du sol.

Défi, fierté ou ignorance?
Une fois les touristes partis, nous abordons les vendeurs en question. «Savez-vous que ce que vous faites est illégal ?» La réponse nous vient de Mouh, un nomade qui vit de ce métier depuis 25 ans et qui chaque jour, parcourt 20 km pour rejoindre les sites pittoresques afin de collecter les pierres et fossiles qu'il vend à 5, 25 ou 50dh selon la «tête» du client: «Nous n'avons jamais entendu parler d'une interdiction quelconque. En plus, que voulez vous dire par objets patrimoniaux ?», demande-t-il. Car pour ces «nomades», il s'agit d'objets vendables au même titre que ceux d'artisanat. D'ailleurs, ils sont proposés au public sans aucune crainte. Rares en fait les commerçants qui les cachent et ne les présentent qu'aux intéressés. Des connaisseurs dont la majorité semble ignorer, (au moins au moment de l'achat), la loi marocaine en terme d'objets patrimoniaux.
«J'étais loin d'imaginer que ces fossiles et pierres travaillées pouvaient se vendre à gros prix.

Je croyais naïvement que tout ce matériel historique appartenait de facto à la communauté scientifique, aux centres de recherche et aux musées» témoigne une touriste qui croit avoir acheté des imitations.
14h00 : Fin de la visite. Conscients de la gravité de la situation, nous quittons «Lcariane», son soleil brûlant, et ses secrets enfouis. Mhamed, nous informe que pour cerner un peu les dégâts dont souffrent les sites archéologiques du Sud marocain, il suffit de savoir que le nombre d'objets mis actuellement en vente rien qu'à Erfoud, Rissani et Alnif, suffiront à meubler les vitrines de deux ou trois musées régionaux. Ceci, sans compter les quantités qui ont traversé illégalement les frontières. Inutile de tirer donc une sonnette d'alarme et rappeler qu'il faut se pencher sérieusement sur cette problématique nationale. Contentons nous de dire: Halte à l'hémorragie du patrimoine. C'est toute une mémoire qui s'efface… Notre mémoire.
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Les trilobites du Maroc
Les trilobites (ou Trilobita) constituent une classe d'arthropodes marins fossiles ayant vécu durant le paléozoïque (ère primaire) du Cambrien au Permien.
Les derniers trilobites ont disparu lors de l'extinction de masse à la fin du Permien, il y a 250 millions d'années. Les trilobites sont bien connus car ils sont certainement le second groupe le plus répandu de fossiles après les dinosaures. Par ailleurs, ils ont donné les fossiles les plus diversifiés: on recense entre neuf et quinze mille espèces au Maroc. La plupart d'entre elles étaient des animaux marins simples et petits, qui filtraient la vase pour s'alimenter. Rappelez vous que le trilobite régnait en maître dans les mers de l'ère primaire. Un jour, il a disparu pour ne laisser que quelques vagues cousins pour prendre la relève. Les étoiles de mer pataugeaient aux mêmes endroits et peuplent les océans comme si rien ne s'était passé depuis 400 millions d'années.

Source : Mohamed Sefrioui | LE MATIN
22/05/2008

 

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