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La bataille de Bougafer, une symphonie patriotique aux couleurs de la bravoure



Le capitaine Henry de Bournazel fut abattu. Le Général Huré accepta la négociation. Assou Oubaslam, entré en dissidence depuis le 13 février 1933, redescend du Saghro à Ikinouen. Les Aït Atta entrèrent dans les annales de l'histoire.


A 35 ans et quelques mois, Bournazel s'était déjà bâti un nom parmi les officiers les plus en vue. L'information fit vite tache d'huile aux salons parisiens. La bataille de Bougafer eut une influence sur la stratégie coloniale sur le terrain, mais aussi sur la donne politique d'une France en crise. Les braves combattants des tribus d'Aït Atta ne surent pas que depuis le Saghro, mont dans lequel ils s'étaient retranchés, ils étaient en train d'écrire une page d'histoire indélébile. Leurs fusils artisanaux eussent l'effet de bombes.

La bataille de Bougafer rappela aux stratèges français l'héroïsme de l'émir Abdelkerim El Khattabi qui, onze ans plutôt, avait lors de la célèbre bataille d'Anoual, vaincu l'Espagne, l'autre puissance coloniale, dans des conditions presque similaires.

Dans les deux batailles, il n'y a pas de secret. Le manque d'effectif et de matériel fut intelligemment remplacé par un sens aigu de l'organisation et une parfaite mise à profit des données géographiques. Le tout est bien évidemment mêlé à un patriotisme intact et une bravoure inégale.

En fait, depuis 1932, les tribus d'Aït Atta s'opposaient aux assauts des partisans du Pacha Glaoui, connu du reste pour sa cruauté. Les services coloniaux faisaient une guerre par procuration.

Lors d'une ""harkas"" l'Amghar des Aït Atta fut assassiné. Un seuil que les populations ne pouvaient pardonner. Aidé par son frère Bassou qui ramenait des armes de Marrakech, Assou Oubaslam, de son vrai nom Issa Ou Ali N'Aït Baslam, devint le nouvel Amghar. Il dirigea ses troupes de manière charismatique. A quarante ans environ, l'Homme faisait l'unanimité autour de lui. Une guerre ouverte fut déclarée. Les légionnaires essuyaient de plus en plus de pertes humaines. Le capitaine de Bournazel, dit ""Diable rouge"", allusion à sa tunique rouge habituelle, décida de passer à l'offensive. Certes, l'étau se resserra, notamment vers le 20 février, autour des combattants de Assou Oubaslam, mais la résistance n'en devint que plus farouche.

Prévisible, la bataille n'est aucunement équilibrée. Les guerriers, accompagnés de leurs familles, ne dépassaient pas, dans les meilleurs des cas, 4 à 5 milles personnes. En face, une armée de 83.000 hommes armés jusqu'aux dents.

Les Aït Atta devaient combattre des goumiers marocains, des spahis algériens, des légionnaires étrangers, et des partisans du Pacha Glaoui.

Heureusement pour ces guerriers amazighs, les envahisseurs n'étaient pas là pour une cause juste. Et puis, le capitaine Bournazel qui vivait encore sur ses récents triomphes au Tafilalet avait probablement sous-estimé les compétences combatives d'un caractère coriace. Ceci allait lui être fatal. Sa position habituelle en tête des troupes lui a valu une blessure d'abord, et la mort ensuite. Le bilan global est plus que surprenant. Avec toute l'armada des Français, les pertes parmi les combattants étaient de l'ordre de 1300 personnes dont beaucoup de femmes et d'enfants, alors que l'ennemi avait perdu 3500 militaires dont 10 officiers.

Tel l'émir Abdelkerim, Assou Oubaslam allait, vers la fin, se servir de sa sagesse. Ce fut le 25 mars 1933. Il ne fallait pas donner d'occasion aux 44 avions de guerre et à l'artillerie de gros calibre pour commettre le pire. Il fallait éviter un carnage.

Ce fut la négociation digne des grands politiciens. Aux couleurs d'une victoire, la poignée de main avec le Général Huré resta historique. ces Imazighens du versant sud du Haut Atlas, étaient devenus omniprésents dans les ouvrages d'histoire de la France coloniale. Ils ont donné la preuve que la résistance rifaine n'était pas un cas isolé. L'histoire en garde encore les traces.

Ayant fait sa connaissance, un an après les événements du Bougafer, l'historien français Bordeaux Henri avait qualifié Assou Oubaslam d'""un homme au beau visage grave, au corps maigre et musclé, impassible et indifférent d'apparence, mais fier et plein de dignité, et qui imposait la confiance"".

L'indépendance recouverte, Assou Oubaslam fut nommé par feu SM Mohammed V, Caïd sur la région d'Ikniouen. Décédé en 1960, l'homme n'aura certes pas vécu beaucoup au Maroc indépendant, mais il avait toujours respiré l'air de la liberté.

Source : MAP
12/02/2007

 

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